Le mot « art » est un mot polysémique. Poly= plusieurs, sémique = sens.
Tout comme le mot artiste, le mot « art » a plusieurs sens. On parle d’art en parlant d’une activité (peinture, sculpture, etc.), d’un produit (une œuvre d’art), ou de l’idée que l’on se fait d’une activité (l’art du jardinage, l’art de déranger les autres…).
L’art est le propre de l’être humain. La nature ne créé pas, elle produit et reproduit. Je dis cela bien sûr avec le plus grand respect pour la nature : pour moi, c’est une source inépuisable d’inspiration et ma connexion avec les animaux et les éléments est extrêmement forte. Mais si la nature créé parfois quelque chose, c’est « par accident ». Comme un enfant pourrait peindre une toile abstraite « par accident ».
Dans cet article, j’aimerais vous partager mes connaissances et mes croyances concernant l’Art. À vous ensuite de vous faire votre propre idée, et de nous la partager dans les commentaires pour alimenter le débat.
Note: afin d’alléger le texte, la forme féminine est employée sans aucune valeur discriminatoire.
J’ai décidé d’organiser mes idées et de vous les partager en suivant le cours de la vie : l’art dans le passé, l’art dans notre présent, et l’avenir de l’art.
Les leçons du passé
L’histoire de l’art nous apprend beaucoup sur nous-même. Et en peinture tout comme dans la vie, le passé est là pour nous aider à mieux comprendre le présent, mais certainement pas pour le reproduire. Sinon, nous vivons dans le passé, et il n’y aura plus d’évolution. Donc, il est important de comprendre que ce que nous définissons comme de l’art dans le passé ne sera pas forcément de l’art dans le présent ou dans l’avenir.
L’art dans le passé se découpe en trois périodes : l’art ancien, l’art moderne et l’art contemporain. Je ne vais pas m’étendre là-dessus, le but n’est pas de faire un cours d’histoire de l’art. Alors voici un résumé très rapide.
Un peu d’histoire de l’art
L’art ancien est tout ce qui fait référence à l’art avant la moitié du 19e siècle (~1870). L’arrivée des peintres impressionnistes sonne la fin de l’art ancien et le début de l’art moderne. Certaines diront qu’Édouard Manet est l’initiateur de l’art moderne, et d’autres, comme Picasso, nommeront Paul Cézanne comme le vrai père de l’art moderne. Mais disons qu’on se situe dans ces dates là.
L’art moderne, quant à lui, est une période qui prend fin vers 1950 avec l’arrivée du pop-art. On nomme alors cette période « l’art contemporain », période dans laquelle nous vivons encore, à priori.
Pourquoi « à priori »?
Parce que c’est l’histoire qui nous le dira. En effet, les premiers peintres impressionnistes furent ridiculisés, critiqués, jugés, bafoués, refusés avant de commencer à faire leur place tranquillement (pour finalement battre tous les records de vente jusqu’aux années 1990 environ). Au début, certains de ces artistes troquaient leurs toiles pour acheter leurs tubes de peinture. Donc à l’époque, personne ne disait « C’est le début de l’art moderne! ».
L’art comme marque du temps
La leçon que ce passé nous apprend, c’est que l’Art (avec un grand A) se définit avec le temps. Que lorsque nous avons « le nez dedans », il est difficile de savoir si nous sommes en train de construire quelque chose de plus grand que nous, ou bien si nous tomberons dans l’oubli.
Il est donc important de continuer à faire ce qui nous plaît, et non à chercher à plaire. Car si les peintres impressionnistes avaient chercher à plaire, ils n’auraient tout simplement pas existé.
L’autre leçon est qu’un mouvement ou un art se place en contexte. Je m’explique : la technique utilisée par les impressionnistes est actuellement maîtrisée par beaucoup d’artistes peintres. Et pourtant, ils ne passeront pas à l’histoire. Non seulement parce que l’effet d’originalité est passé, mais aussi (et surtout) parce que cela ne s’accompagne pas de tout le contexte social et culturel de l’époque. Car à l’époque, les impressionnistes étaient des rebelles qui cassaient tous les codes de l’art et clamaient que la vision académique et institutionnel de l’art était révolue.
Ce qui n’est pas du tout le cas des peintres impressionnistes actuels, au contraire. Même si je trouve cette façon de peindre magnifique, cela est devenu « classique ». Cela n’en enlève aucunement la beauté, mais en réduit l’impact du point de vue socio-culturel.
L’art comme langage des sens
Depuis toujours, et encore aujourd’hui, on décrit les arts comme un langage universel, puisqu’ils s’adressent à nos sens, et que tous les êtres humains ont les mêmes récepteurs sensitifs. On voit avec nos yeux, entend avec nos oreilles etc. Après, que cela plaise ou non est une autre histoire, comme on vient de le voir (il y a aussi les codes culturels, temporels, sociaux etc., mais je simplifie ici).
D’une sensation naît souvent une émotion : le coeur qui bat vite et le souffle coupé sont des sensations qui font naître par exemple la peur, ou au contraire la joie, qui sont, elles, des émotions. Ensuite, ces émotions donnent elles-mêmes naissance à des sentiments à plus long terme : sentiment de déjà-vu, sentiment de bien-être, sentiment de malaise etc. L’art est une façon de s’adresser à tout ce système complexe, à la fois primitif (sensations>>> émotions) et très évolué (émotions>>> sentiments).
Un exemple simple : lorsque l’on surprend soudainement quelqu’un, la sensation de base est la même. L’émotion alors ressentie est la peur. C’est la réaction primitive. Ensuite, plusieurs sentiments peuvent apparaître selon la personne : certains vont en rire, d’autres pleurer, d’autres encore se fâcher. Certains penseront à une revanche équitable et drôle, d’autres vont penser à une vengeance démesurée. C’est la partie plus « évoluée ».
L’art, en s’adressant à tout se système sensitif, défie le temps et l’espace puisque les humains auront toujours des sens à stimuler.
L’art dans le présent
Art vs technique
Voici ma théorie : tout « art » en soi est voué à se transformer en artisanat, voire en simple technique avec le temps.
Par exemple, l’art de peindre comme les impressionnistes est maintenant enseigné comme une technique. Et certains peintres actuels la maîtrisent parfaitement. S’ils ne font alors que la reproduire, sans intention particulière et authentique, leur démarche se rapproche plus de l’artisanat que de l’art. Par contre, s’ils cherchent à exprimer et/ou partager un message (intime, profond, subtil…) grâce à cette technique, on reste dans le domaine de l’art.
La seule façon de différencier ces deux cas, c’est en lisant la démarche de l’artiste et en découvrant son message. Car une « belle œuvre » peut avoir été créé avec l’une ou l’autre intention. Et inversement, une œuvre à priori laide peut avoir une grande valeur artistique en lien avec la démarche, le message de l’artiste.
Donc un art passe par un moment de « dévaluation » lorsqu’il est réduit à une simple technique, puis, lorsque les artistes se l’approprient pour aller au-delà de la technique et pour aider l’humanité à grandir, il redevient un art. C’est ma lecture basée sur mes observations, bien sûr.
La nouvelle mode
Actuellement, pratiquer une activité artistique est très à la mode, et je trouve que cela apporte beaucoup de beauté et de légèreté dans notre monde. Enseignant moi-même la peinture et la créativité, je vois énormément de potentiel artistique chez les personnes qui s’intéressent à la peinture. J’en suis ravie!
Mais voilà, rapidement, les personnes qui progressent dans leur pratique veulent plaire, voire vendre, et « trouver leur style ». Et malheureusement, cette attitude s’accompagne souvent d’une chute de leur créativité et les amènent à avoir de plus en plus une pratique purement technique de la peinture : elles s’auto-copient, ne cherchent qu’à plaire aux acheteurs et oublient la raison profonde pour laquelle elles ont commencé à faire de la peinture. On s’approche alors plus d’une pratique artisanale, ce qui est parfait pour la personne qui fait ce choix si ce choix la rend heureuse (j’ai une grande admiration pour les artisans, que je considère d’ailleurs comme une branche artistique), mais c’est dommage pour l’art qui perd une adepte (tout du moins temporairement, car on ne sait pas ce que la personne produira dans le futur).
La nouvelle mode c’est de penser que si c’est beau, c’est de l’art. Si ça reçoit des prix, c’est de l’art.
Et bien dans ce cas, la plupart des faussaires seraient des artistes? Les copieurs aussi?
Ma position
Alors je sais que certains d’entre vous doivent être fâchées. Car je dis toujours « vous peignez, vous êtes une artiste » et cela paraît en contradiction avec ce que j’expose ici. En fait, non, je continue de le penser. Mais voilà la différence: lorsque l’on est une artiste débutante, c’est normal de ne pas produire d’oeuvre d’art. Par contre, lorsque l’on est professionnelle et que l’on fait le choix de transformer sa pratique artistique en pratique purement technique, il faut arrêter de croire que l’on fait de l’Art avec un grand A. On fait plutôt du beau. Et c’est parfait aussi. Le monde en a besoin!
C’est comme un chef cuisinier de renom qui ne renouvelle plus son menu. C’est toujours excellent, mais il va tranquillement se faire oublier. Même si c’est toujours aussi bon.
Bien sûr, c’est mon avis. Et personnellement, si j’ai commencé à penser cela, c’est parce que j’ai commencé à en avoir marre de faire toujours la même chose. Je changeais alors de style chaque année pour avoir l’impression de ne pas m’auto-copier, haha. Je me suis alors penchée sur mon « pourquoi je peins » et j’ai compris qu’il était temps d’affiner ma démarche artistique.
Jusque là, j’avais réduit ma démarche à une simple description des techniques que j’utilisais. À cela j’ajoutais une description des « visuels » qui m’inspiraient. C’est acceptable pour commencer, mais maintenant, il est temps de me positionner en tant qu’être humain et comprendre non seulement « pourquoi je peins », mais aussi « pourquoi j’expose » (lire l’article sur comment écrire sa démarche artistique).
Et même si je me suis toujours considérée comme une artiste, je sais maintenant que ce que je créais avant n’était pas forcément de l’art. Ou alors de l’art embryonnaire. Et c’est actuellement mon nouveau défi : je veux être une artiste qui créé de l’art, et donc, qui repense sa démarche pour élever mon âme et participer à quelque chose de plus grand. Je veux que mes toiles aient un impact, je veux que mes expositions ouvrent un chemin, je veux que mes toiles soient un déclencheur chez l’observateur. Un déclencheur qui les aide à s’élever également.
L’avenir de l’art
Résumons…
Actuellement, il est impossible de savoir comment l’art va marquer l’histoire. Puisque comme je le disais plus haut, on a le « nez dedans ».
Certaines artistes veulent contribuer au monde en faisant du beau. Elles permettent à chacun d’entre nous de se remplir de bonnes énergies et à en accrocher dans notre salon.
>>> C’est l’art décoratif ou commercial, très à la mode en ce moment. C’est nécessaire, vital même, car cela nous aide à grandir en tant qu’être humain en apprenant à nous sentir mieux et à toucher le bonheur dans notre quotidien.
D’autres artistes ont un message, une mission. Elles cherchent à tout prix à l’exprimer à travers un canal artistique, pour être sûre de toucher tous les êtres humains.
>>> C’est l’art « à démarche » qui vise à partager un message puissant qui transcende le quotidien et, dans l’idéal, qui traverse les frontières et les époques.
Il n’y a pas un art meilleur qu’un autre. Le premier se rapproche de la pratique artisanale, mais n’est pas pour autant moins louable que le deuxième. Le deuxième fait parfois « chou blanc » en mettant en avant des artistes qui finalement tomberont dans l’oubli pour la pauvreté de leur message.
Je pourrai parler de cette différence encore longtemps, et je le ferai sûrement dans un autre article, puisque là, je veux revenir à la notion de l’évolution de l’art dans le temps.
Mais alors, quel est l’avenir de l’Art?
L’avenir de l’art, c’est nous tous. Car actuellement, exercer une pratique artistique est à la portée de tout le monde. On a accès aux outils facilement, aux connaissances, et surtout, on ose de plus en plus.
Est-ce que tous les artistes débutants et professionnels créent de l’art? Pas forcément, mais comme c’est seulement l’histoire qui le décidera, il vaut mieux ne pas trop se poser de questions.
L’exemple parfait, c’est Gustav Klimt. Il a fait beaucoup d’art commercial (commandes pour des riches bourgeois). Et pourtant, maintenant il est dans les musées pour d’autres raisons.
Conclusion : l’art c’est quoi?
Faire de l’art, c’est s’exprimer grâce à un langage des sens (pour la peinture, langage visuel) en vu de toucher les sens des autres (émotions, sentiments).
Pour faire du beau ou pour faire passer un message intemporel? Peu importe, car au final, ce qui compte c’est que l’art aide l’humanité à s’élever. Même si parfois, cela prend des détours inattendus…
Les étiquettes et les catégories d’art sont là pour nous rassurer, moi la première, mais n’ont finalement pas vraiment d’importance. Car l’Art, c’est comme l’Amour : on peut essayer de l’expliquer, mais au final, c’est quelque chose que l’on ressent. Et c’est ça le plus important…
Au plaisir de lire vos commentaires !
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3 Comments
Bon article. voici un lien vers un podcast tentant de répondre à la question: L’art c’est quoi? https://orinoco-podcast.com/2022/01/06/lart-cest-quoi/
Un gros merci LiliFlore pour ton témoignage et ta sagesse.
Ça me donne le goût de continuer mon cheminement À LA DÉCOUVERTE DE L’ARTISTE EN MOI.
Ce qui est beau pour un n’est pas nécessairement beau pour l’autre.
Ce que je trouve beau , c’est ce qui me fait vibrer et me donne des émotions.
Paule
Merci Paule pour ton commentaire 🙂
Ravie d’avoir pu aider!
Bonne peinture!